Depuis que je l’ai lue, une info me tarabuste. Dans une commune des Hautes-Alpes, l’inspecteur d’académie a décidé la fermeture d’une classe, le conseil municipal refusant un regroupement « pédagogique » avec la commune voisine. Naturellement, les parents d’élèves s’opposaient à cette fermeture, comme auparavant ils avaient combattu le transfert de leurs enfants dans l’école voisine (longueur du trajet, routes difficilement praticables en hiver…) Et Zorro est arrivé… Le maire a décidé d’embaucher, sur le budget communal, une professeur des écoles qui fait cours dans les locaux où se trouvait la classe fermée. Circulez, y a plus rien à voir. Cocanha !

L’inspecteur d’académie est content, il sera bien noté puisqu’il a su appliquer la RGPP en supprimant son quota de postes de fonctionnaires et en se contentant d’acter l’ouverture d’une classe privée hors contrat dans la commune.. Les parents d’élèves sont satisfaits puisqu’ils conservent leur classe. La professeur des écoles est contente d’avoir été embauchée car elle a pu ainsi être nommée dans le département pour lequel elle n’avait pu avoir sa mutation. Le maire est fier de son idée puisqu’elle lui permet de régler un problème, de ne plus avoir à se battre contre la politique gouvernementale qu’au fond il approuve, et sans doute de glaner quelques voix pour les prochaines élections. Et les contribuables locaux n’y verront que du feu puisque les ressources de la commune, assises sur les sports d’hiver, peuvent facilement absorber cette dépense sans augmentation des impôts locaux. Ben ségur ! Osca !

Mais, comme disait Wurmser…. Ronflon je suis, ronflon je reste : je ne suis pas sûr que cette solution soit la bonne. Bon, je ne dirai rien de l’enseignant qui a choisi de quitter provisoirement l’éducation nationale pour changer de département, son choix n’aurait pas été le mien…Bien dans l’air du temps, trop individualiste, pas assez solidaire à mon goût… M’enfin, réfléchissons un peu. Le maire a pu proposer cette solution parce que sa commune avait des ressources suffisantes. Cela veut donc dire que dans une commune moins riche, la classe aurait été fermée et les enfants priés d ‘étudier dans de mauvaises conditions ? Mais où est donc passé l’égalité de traitement des citoyens ? Ici on a droit à une classe, et pas ailleurs… Belle idée de la solidarité nationale ! Jusqu’à présent, l’école était un service public, gratuit et ouvert à tous. Dorénavant, vous y aurez droit si vous avez les moyens, et si la collectivité locale a décidé de mettre la main à la poche. Tiens, comme avec les livres de classe en lycées, ou les tableaux numériques, ou les postes d’agents de services des collèges et lycées. Le maire accepte ce transfert de charge parce que sa commune en a les moyens, fera t-il de même pour les prochaines fermetures ? Est-il prêt à embaucher un magistrat parce que les tribunaux sont surchargés ? Peut-être a-t-il déjà une police municipale ? Il aura été contaminé par le modèle étasunien ! Le rêve américain ! Et en plus, il a réussi à casser le statut du fonctionnaire. Ce maire s’est arrogé le pouvoir de recruter un enseignant selon ses critères… Il pourra aussi sans doute le licencier à sa guise quand il faudra fermer la classe. Pourvu qu’il ne lui prenne pas l’envie de délocaliser son école, comme une vulgaire usine, pour réduire les coûts. L’enseignement n’est pas une marchandise, l’éducation nationale n’est pas une entreprise. Et ces élus devraient abandonner la pédagogie du renoncement et retrouver le chemin des luttes. Zo, bolegam ! Viva lo cambiament vertadier !