Retrait immédiat du projet de Loi instituant « l’engagement éducatif »

A la demande des organisateurs de Centres de Vacances et de Loisirs, le Parlement est saisi d’un avant projet de Loi à propos de l’ « engagement éducatif » Après la maintenant célèbre Loi sur « l’égalité des chances », on continue dans la démagogie et l’imposture verbale en voulant instituer un soi-disant « engagement éducatif » qui n’est autre qu’une forme de grande précarité.

Porté de longue date par les Fédérations d’Education Populaire, le remplacement de l’annexe 2 de la Convention Collective de l’Animation par un nouveau statut des directeurs et animateurs occasionnels des Centres de vacances et de loisirs se concrétise aujourd’hui avec la création du Contrat d’Engagement Educatif (CEE), et serait même élargi aux formateurs BAFA/BAFD

En effet ce nouveau projet de Loi voudrait instituer des « contrats » de 80 jours maximum dans l’année entre des jeunes animateurs occasionnels et des employeurs associatifs, sans passer de surcroît par la case sans doute trop contraignante d’un véritable contrat de travail. Ce nouveau contrat serait accompagné de modifications inacceptables du code du travail. « L’innovation » ici improprement appelée « engagement éducatif » et soutenue d’une manière paradoxale par les directions des grandes Fédérations de l’Education Populaire est de taille, puisque ces animateurs « engagés » en cas de litige ou de revendications ne pourraient plus avoir recours aux prud’hommes

Au nom de la défense des centres de vacances et de loisirs qui manquent cruellement de moyens pour fonctionner, on introduit ici une confusion entre l’engagement militant et l’emploi de salariés pour assurer l’accueil éducatif des enfants et des adolescents.

Pour les organisations syndicales profondément attachées à la mission d’Education Populaire, la reconnaissance des métiers de l’animation ne passe bien évidement pas par une nouvelle forme de précarité ou par des mesures indignes au regard du Droit du Travail, dans une société dont le seul but semble être de broyer femmes et hommes et de condamner l’avenir de sa propre jeunesse. C’est encore ici, une véritable provocation après le rejet du CPE que de vouloir s’appuyer à nouveau sur la précarité des salariés pour asseoir la pérennité de ces organismes associatifs. C’est une remise en cause du SMIC avec une « indemnité » qui sera nettement inférieure au salaire minimum ; où on forfaitisera à minima les charges sociales en amputant d’autant le calcul du droit à la retraite pour ces salariés.

« les personnes titulaires d’un contrat d’engagement éducatif seront rémunérées sur la base d’un forfait journalier, dont le montant minimal sera fixé par décret. » projette cette nouvelle Loi voulant instituer un autre contrat précaire.

Toutes les organisations syndicales se sont déjà opposées à ce projet dans différentes instances nationales, en particulier au CNEPJ. Mais puisqu’il a été adopté par la Chambre des Députés et qu’il sera discuté au Sénat le 9 mai prochain, nous dénonçons clairement les dangers qui en découlent et les dérives trop facilement prévisibles :
l’absence de limitation d’utilisation du CEE : on pourra rester animateur BAFA en CEE jusqu’à 65 ans ! Puisqu’on peut « s’engager » à nouveau chaque année
la quasi-impossibilité de recours en Prud’hommes, puisque le CEE est un contrat dérogatoire au droit du travail sur pratiquement tous les chapitres sensibles (salaire minimum, durée du travail, heures supplémentaires, heures d’équivalence, travail de nuit, repos quotidien et hebdomadaire).
l’absence de niveau maximal de diplôme pour signer un CEE : rien n’empêchera un employeur de recruter en CEE un animateur professionnel qualifié (BAPAAT, BEATEP, BP, voire DEFA..) ou en cours de formation, pour peu que celui-ci, ne trouvant pas mieux, l’accepte !
les difficultés prévisibles de vérification effective du non-dépassement de la limite des 80 jours/an (surtout en cas d’employeurs multiples), laissée à la charge des Inspections du Travail déjà surchargées.
l’éternelle absence d’aide financière à la formation (BAFA, BAFD, AFPS, Surveillant de Baignade) par l’employeur, ainsi que de l’insuffisante valorisation des qualifications obtenues dans « l’animation volontaire ». Plus globalement, et sous couvert d’un discours généreux sur l’utilité sociale des CVL, ce texte concrétise la politique libérale du gouvernement dans le secteur de l’animation, avec son cortège de déréglementation, de précarisation et de régression sociale. Cette nouvelle remise en cause fondamentale du Code du Travail est de même nature que celle qui a prévalu à l’instauration du CNE et du CPE. L’opinion publique s’est largement fait entendre sur ce qu’elle pensait d’une telle société. Des évolutions doivent être trouvées ; des changements doivent être mis en place avec les salariés qui sont aussi des citoyens. Ils ne se feront pas par la précarité ; ils ne s’amorceront pas contre eux.

Les syndicats du Secteur de l’Animation Socioculturelle et Sportive exigent le retrait immédiat de ce projet de Loi. La défense des Centres de Vacances et de Loisirs nous concerne. Mais elle passe d’abord par l’ouverture d’un réel débat entre l’Etat et les Fédérations d’Education Populaire, les organisateurs associatifs de centres de vacances et toutes les représentations syndicales pour que la pérennité de ces structures s’appuie sur une véritable conscience de l’utilité sociale que ces organismes proposent, dont le financement doit s’appuyer sur l’adhésion de ses usagers et les subventions territoriales ou d’Etat, dans le but de permettre un développement de l’accès aux loisirs pour tous et non sur la précarité de ses salariés. USPAOC-CGT, FERC-CGT, EPA-FSU, SNEP-FSU, SGEN-CFDT, SUD-SANTE-SOCIAUX, ,SUD-EDUCATION, SNEPAT-FO, SEP-UNSA