Un courrier de notre camarade Jean-Paul Duparc, militant snes et r ?dacteur en chef du Patriote ?clairant sur les enjeux des luttes d’aujourd’hui.. M ?thode peu habituelle de notre site mais une situation et une mobilisation exceptionnelles demandent une argumentation tr ?s diversifi ?es…
A l’heure où le gouvernement vient de faire passer au Sénat, dans la phase ultime d’examen du texte, un amendement prévoyant une "réforme systémique" du système de retraite pour 2013 (!), il est utile de souligner que :
Cet amendement est un aveu que, comme Radio Paris en d’autres temps, ce gouvernement dans sa guerre contre le monde du travail ment effrontément, et son "argumentaire officiel" en est tout ridiculisé :
sa réforme n’assure nullement le "financement des retraites jusqu’en 2020"……
Il ne s’agit pas de "sauver le régime par répartition" puisqu’une "réforme systémique" "avec mise en place d’un "système universel par points ou compte notionnel" est posée en perspective, qui après le recul de l’âge de la retraite fragiliserait encore la situation des salariés et mettrait leur retraite en dépendance du CAC40
Enfin, sur ce système par point, trouver ci-dessous un article que j’avais écrit dans Le Patriote du 16 avril 2010 sur ce "faux ami suédois". A noter depuis le fameux point a connu une nouvelle baisse de 3% en 2010, après -4% en 2009.
Raison de plus pour ne rien lâcher et agir contre la promulgation de cette loi, son retrait et son abrogation le cas échéant.
cordialement jean paul duparc
Répartition-Capitalisation : Le faux ami suédois
Magnifié au temps du libéralisme triomphant, le règne sans partage de la « concurrence libre et non faussée » alliée à un individualisme conçu en opposition à la solidarité, a du plomb dans l’aile. Il faut dire que la crise financière des années 2008-2009 est passée par là, et que rare sont les chantres d’un système pur et dur de retraite par capitalisation. Il faut dire aussi que les incertitudes qui frappent les fonds de pension et de capitalisation, certains allant en Grande Bretagne jusqu’à proposer de différer à 70 ans l’age d’une retraite d’un montant aléatoire, est plus que dissuasif.
Il convient toutefois comme le propose Catherine Mills d’aller au bout du raisonnement. Même à « bas bruits » ou en « version soft », comme un « complément » à la répartition, la capitalisation ne peut être une solution pour la société. « La répartition se fonde sur le versement immédiat des cotisations des actifs employés pour servir des prestations à ceux qui sont à la retraite », l’argent est donc immédiatement réinjecté dans la « demande effective » qui dynamise l’emploi, les salaires, l’économie. A l’inverse tout mécanisme de capitalisation, outre son caractère profondément inégalitaire, se traduit par de l’argent capté par les marchés financiers, placé pour la seule rentabilité financière, au détriment, on vient de le vivre à grande échelle, de l’économie réelle.
Nos penseurs et décideurs libéraux en pincent désormais pour le « système suédois », appellation qui a la sonorité rassurante du modèle social-démocrate des années 1970-1980, mais qui, dans la Suède des années 2000-2010, s’est singulièrement social-libéralisé au détriment des salariés.
La « répartition » peut en effet avoir deux facettes :
Une « forme salariale », pour reprendre la terminologie de Bernard Friot, qui est celle que nous connaissons en France. En fonction d’une durée de cotisation,du montant des salaires perçus,et d’un age légal de départ à la retraite, une retraite est garantie et on peut déterminer à l’avance clairement ce que sera le « taux de remplacement » obtenu.
Une « forme prévoyance », où en cotisant le salarié accumule des « points », mais la « valeur du point » au moment où il prendra sa retraite est une inconnue, dépendant notamment des placements effectués par les fonds de prévoyance sur les marché financiers, de l’espérance de vie moyenne, etcC’est cette évolution systémique qui a été effectuée en Suède ces dernières années, renvoyant la retraite à une forme d’ »épargne points » dont la valeur n’est plus assurée. Résultat, les retraites versées en Suède en 2009 ont baissé de 4%, la « valeur du point » ayant évolué négativement. C’est un système qui pousse le salarié à retarder le plus possible son départ en retraite au fur à mesure que l’espérance de vie s’allonge.
Il n’est pas étonnant que l’ensemble des cénacles européens montre en exemple ce « modèle suédois » qui porte à faire disparaître le lien entre la retraite, le salaire, un âge légal de départ à la retraite et une durée de cotisation.
D’où l’importance dans la bataille politique et sociale qui s’annonce sur les retraites d’être clair sur l’intérêt d’un régime par répartition salarial, le seul qui peut garantir un bon niveau de retraite dans la durée, éviter les gâchis des prélèvements et des spéculations des marchés financiers, et fournir pour les jeunes générations une lisibilité à long terme.
Jean Paul Duparc